La lecture est une amitié.
J’ai plein de choses à vous écrire, ou à écrire en général d’ailleurs. Je manque un peu de temps, voilà tout.
Je me suis remise à lire, ces derniers temps. Je lis des livres qu’on m’a offerts ou prêtés récemment, parce que c’est le bon moment pour les lire. Je lis des livres que je me procure sur un coup de tête, et qui me ravissent. Je lis des livres écrits par des femmes avec plus de satisfaction encore. Je lis de la non-fiction avec une sorte d’urgence, comme si ma vie en dépendait. Je me nourris, je me fais plaisir.
Dans le même temps, je me débarrasse sans vergogne des livres sans intérêt. Je ne peux plus me forcer à finir des livres que j’ai commencés en pensant qu’ils seraient bien, que j’ai continués pour leur donner une vraie chance, et dans lesquels je me suis ennuyée, enlisée, perdue. Je crois que j’ai officiellement passé l’âge de perdre mon temps. Ca aura quand même pris pas loin de 40 ans!
J’ai commencé à lire de la non-fiction lorsque je me suis documentée sur le polyamour. Et j’en ai remis une couche pendant ma séquence bouquinovore du premier confinement Covid. Ces dernières années, je me suis mise à lire plein de newsletters politiques, en plus du monde diplomatique, et à suivre des chaînes youtube qui commentent l’actualité (avec humour : il vaut mieux en rire). Il y a une nouvelle surenchère ces derniers temps, entre les podcasts que j’écoute et qui recommandent des livres sur certains thèmes qui m’intéressent, les copines engagées qui m’offrent ou me prêtent des livres passionnants, et une certaine effervescence en moi, une frénésie de lecture comparable à celle de la période Covid (le temps en moins).
C’est étrange parce que pendant la plus grande partie de ma vie, de ma jeunesse, je ne lisais que de la fiction. Et je lisais beaucoup. Après les romans d’aventures, historiques, d’enquêtes et d’amitié de la bibliothèque rose, rouge et or, verte, et les énormes pavés de Victor Hugo qui ne m’ont même pas découragée, j’ai découvert la science-fiction, l’anticipation, des romans plus adultes, avec du sexe et tout, et par la suite la fantasy, qui me faisaient voyager toujours plus loin dans les contrées de l’imaginaire. Comme dans les films, il n’y a que le genre « horreur » auquel je n’adhérais pas du tout, et que je trouvais plutôt ridicule et mal fait. Enfin c’est vrai que c’est un peu difficile de me faire peur, je crois.
J’ai moins lu à l’âge adulte, en tout cas moins de livres, mais toujours un peu quand même. J’ai toujours des bouquins empilés sur ma table de chevet ou ailleurs, que je compte lire (un jour). Je pense même qu’il n’y a jamais eu un instant dans ma vie où je n’avais pas un livre en cours. La dernière page tournée de mon livre précédent, je mets toujours mon marque page dans un autre livre, même si je ne lis que la page de garde. (Vous faites ça aussi?) La lecture est une de ces choses constantes, perpétuelles et immuables, dans ma vie. Parfois discrète, par moments envahissante et obsédante, jamais neutre.
Les livres m’ont accompagnée toute ma vie. Ils m’ont apporté beaucoup. C’est difficile à imaginer, qui je serais sans tous ces livres qui m’ont inspirée, intéressée, ouverte à de nouvelles idées, qui m’ont permis de tisser des liens avec d’autres lecteurs et lectrices, qui m’ont forgée. Pourquoi est-ce qu’on lit? Je crois que je ne me suis jamais posé la question. C’est pour moi simplement suivre une envie, une envie de découvrir ce qui se cache dans ces pages. Pas seulement l’histoire qui y est racontée, mais les mots eux-mêmes, le ton, les émotions, les liens que je vais faire avec mon vécu, les échos et les résonances que ça peut avoir avec moi, en moi. Pour suivre cette envie, il faut avoir le temps. Moi j’ai besoin d’un lieu calme, pour lire, sans musique, en tout cas sans paroles. C’est une façon de mettre le monde en pause, dans une bulle. Lire, c’est faire du voyage dans le temps. On se retrouve dans quelques heures, une fois mon chapitre ou mon livre fini : le monde aura continué de tourner, et moi je ne serai déjà plus la même.
Ce qu’on lit nous touche, nous pousse, nous change, nous transforme. Alors c’est sûr qu’il faut bien choisir ce qu’on lit. Pendant toute ma jeunesse, j’ai lu des romans écrits par des hommes, ou par des femmes qui essayaient de se faire passer pour des hommes, dans un monde fait pour les hommes, avec des héros masculins, avides de conquêtes et de domination, où les personnages féminins secondaires ne servaient qu’à être séduits. Dans la SF ou la fantasy des années 80/90, les exceptions sont rares, vraiment. J’ai un peu de mal à en lire à nouveau, à présent. Je serais mal placée pour dire qu’ils sont sans valeur, mais je vois surtout leurs points communs, leurs ressemblances, maintenant, et ça m’enchante moins qu’avant. Les sagas et les épopées avec un héros masculin du genre roman initiatique, j’en ai peut-être trop lu. Ma propre initiation est venue depuis, hors des mondes de l’imaginaire, par le biais de films et de séries réalistes, de comédies romantiques ou dramatiques, et dans des livres de non-fiction. La vraie vie, quoi.
J’ai le sentiment, ces temps-ci, d’une véritable urgence à écrire la vraie vie, à l’arpenter, la changer, la vivre, plutôt que de me balader dans la fiction. Je ne sais pas si c’est une phase, ou une évolution. Et je ne sais pas, ce matin, si je peux faire les deux à la fois. Pourtant, on sait tous que la vie réelle dépasse bien souvent tout ce qu’on aurait pu imaginer. Alors c’est sûrement bien plus poreux que je ne l’imagine. Je suppose que je vais simplement continuer à suivre mes envies, où qu’elles me mènent. Je ne sais pas vivre autrement, de toute façon.